Curry madras

En 1640, la Compagnie anglaise des Indes orientales débarque à Madras — l’actuelle Chennai — et découvre un parfum qui embrase les comptoirs : celui des masalas fraîchement pilés chaque matin par les cuisinières tamoules. Le hic ? Le « curry madras » tel qu’on le connaît n’a jamais vraiment existé en Inde. C’est une pure invention britannique, née de la nostalgie des colons qui rêvaient de ramener ces arômes incendiaires dans leurs cuisines londoniennes. Incapables de reproduire la complexité des mélanges régionaux — qui changeaient de rue en rue, de maison en maison — ils ont bricolé une version standardisée, plus corsée, plus colorée, taillée pour les palais européens en manque d’exotisme.

Le vrai génie du madras tient dans cette accumulation d’épices : la coriandre qui apporte ses notes citronnées, le cumin terreux qui répond au piquant volcanique des piments séchés, la moutarde jaune qui révèle son amertume en cuisson, le safran qui colore et parfume. Un concentré d’épices qui ne fait pas dans la demi-mesure.

Un Thermomix expédie en dix secondes ce qui prenait autrefois de longues minutes de pilon. La poudre obtenue a une jolie couleur vibrante — et cela donne finalement un concentré d’épices qui réveille les papilles avec la même intensité qu’aux premiers jours des comptoirs coloniaux.